Les Editions Alfabarre ont organisé samedi 11/10/2014 à
Paris 5ème à 14h30, la présentation des nouveaux produits de la saison
2014/2015 pour les Collections « Paroles
nomades » et « Mon village comme ça ».
Les auteurs des nouveaux ouvrages étaient présents ainsi que
des membres de leur famille, des amis et des invités. Après avoir présenté la
saison, Chekib Abdessalam, auteur et directeur des éditions, a cédé la parole
respectivement à Cynthia Hahn et Monique Loubet pour l’ouvrage collectif
Co-ïncidences, Yo Marchand pour La néonémie des saisons, Samuel Zittoun pour
Mots immuns et enfin à nous-même pour Houara mon amour.
Lors de la présentation de Houara mon amour, nous avons précisé qu’il s’agit avant tout d’un hommage au Maroc à travers l’hommage à ce village du sud marocain des années 70. Le livre a deux objectifs principaux : attirer l’attention des acteurs politiques, dans le cadre de la Régionalisation Avancée, afin qu’ils songent à sauvegarder la mémoire des villages qui deviennent des villes car ils sont dépositaires d’un héritage identitaire historique important, au même titre que les Moussems et les festivals ; inciter les jeunes (en tout cas au moins les jeunes Houari –e-s) à lire pour s’approprier cet héritage en leur proposant un texte qui les concerne, qui parle de leur histoire locale, dans la langue de Voltaire qu’on considère au Maroc, à tort ou à raison, comme étant celle de l’élite. D’ailleurs la question de l’écriture de Houara mon amour en français plutôt qu’en arabe a été soulevée par la salle. Nous travaillons à l’écriture d’une version en langue arabe.
Nous avons ensuite formulé notre conviction quant à la
traduction de la poésie qui a déclenché un débat passionnant. Pour nous, la
poésie est intraduisible. Le texte poétique est l’expression d’émotions, de
sentiments, d’une sensibilité à un instant T. De plus, ces émotions et cette sensibilité
sont intrinsèquement liées à la langue qui les a exprimées. Lorsqu’on traduit
un texte poétique, on change de moment et de langue. Du coup, les émotions et
les sentiments ne sont plus les mêmes. Ils sont altérés par ce transfert. Pour
traduire notre poème en prose dans la langue arabe, nous devons nous-même nous
reconfigurer dans cette langue pour exprimer nos émotions et sentiments
avec la même sincérité et authenticité
qu’en français. Une autre personne ne pourra jamais transcrire fidèlement notre
sensibilité à cet instant T.
Cynthia Hahn n’est pas totalement de cet avis. Si elle
concède qu’effectivement il peut se produire une altération de la sensibilité
d’origine, elle pense que la traduction du texte poétique est plutôt un
enrichissement.
Par ailleurs, nous avons expliqué le choix du poème en prose
pour Houara mon amour. Nous avons
d’abord rappelé que c’est Aloysius Bertrand (Gaspard de la Nuit, 1842) qui en
est le fondateur en France, et que c’est Baudelaire qui l’a sorti de l’oubli,
notamment en écrivant de 1855 à 1864 ses Petits poèmes en prose (Spleen de Paris) publiés à titre posthume en
1869. Et comme le disait Baudelaire, le poème en prose est adapté à la ville.
Nous pensons en effet que le poème en prose ignore les frontières entre les
genres : on y trouve mélangés selon les émotions, le théâtre, l’argumentation, le récit (roman,
nouvelle), et bien sûr la poésie. C’est un moyen d’expression qui laisse libre
cours à l’imagination et à la sensibilité comme un promeneur dans une ville qui
se déplace sans entraves dans des quartiers aussi nombreux et bouillonnants
qu’extrêmement différents les uns des autres. C’est en tout cas ainsi que nous
justifions le choix de la prose dans Houara mon amour. Nous avons même
déclenché l’hilarité de l’auditoire en parlant du poème en prose comme étant le
Schengen de la littérature : aucune frontière entre les grands genres
littéraires ! Liberté de circulation entre les genres, et donc fluidité des
émotions et des sentiments.
La composition même de notre ouvrage est le reflet de cette
liberté : la première partie est constituée d’un long poème en prose, tandis
que la deuxième propose des repères géographiques et historiques. L’ensemble
étant illustré par des images de l’époque convoquée dans le poème. Le livre est
enfin clôturé par des annexes dont des témoignages historiques.
Paris, le 12 octobre 2014,
Abdellatif Chamsdine
abdellatifchamsdine.net
AFM2R (Association Franco-Marocaine des 2 Rives),
afm2r.org
afm2r.org
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