De l’étoile jaune à la pastille rouge. Par Abdellatif Chamsdine

C’est à l'école primaire des Piedalloues à Auxerre (Bourgogne) que le pas a été franchi. Les élèves qui ne mangent pas de porc doivent porter une pastille rouge ! Ils sont 18 à être ainsi montrés du doigt, ciblés, stigmatisés. Comme ceux qui ne mangent pas de viande et qui, eux, sont priés de porter la pastille jaune !

La municipalité, de gauche, est bien sûr embarrassée par cet incident qui ravive des plaies douloureuses de l’histoire de l’espèce humaine datant de la période nazie. Comment en effet ne pas penser aux juifs portant l’étoile jaune imposée par les nazis ? Comment cette école primaire, située dans une municipalité de gauche, s’était-elle autorisée ainsi, en 2015, à marquer, en catimini, des enfants du sceau de la discrimination et en toute impunité ? Pour l’instant. 

Car minimiser cet acte, comme le fait  le directeur de la communication de la ville qui parle « d'une initiative isolée, maladroite, autorégulée" ne suffira pas à rassurer les parents, les associations de défense des droits des enfants et les élus soucieux des valeurs de la République, comme la conseillère municipale de l’opposition de la commune, Malika Ounès,  qui a eu le courage de dénoncer ce scandale jeudi 24/9 soir en conseil municipal : « J'ai été alertée par une mère de famille … Cela renvoie à des heures sombres ", a-t-elle précisé devant Guy Férez, le maire socialiste de la ville.  

Malika OUNES
Conseillère municipale à Auxerre et vice présidente du Conseil départemental
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Le Maire a donc diligenté une enquête administrative. Le service de la communication ajoute : «  A Auxerre nous avons 11 restaurants scolaires, qui servent des repas à plus de 1500 enfants. Il ressort de notre enquête que cette initiative malheureuse et maladroite était isolée. Elle concernait uniquement des enfants de maternelle et de CP qui ne savent pas lire. Et elle a eu lieu seulement une journée. C’est une journée de trop, on le reconnaît et c’est contraire aux valeurs portées par la ville».

Ce discours officiel est cependant contredit par celui des mamans des enfants porteurs des signes. L’une d’elles est catégorique : « Non cela a duré plusieurs jours et cela concernait tous les élèves. Simplement l’équipe de la cantine ne pensait pas que cela allait sortir de l’école» ; Une autre maman confirme à Creusot-infos qui a publié l’information : «J'ai découvert le collier avec la pastille rouge dans le sac de ma fille qui a 9 ans. Je  l'ai questionnée et elle  m'a répondu <>. Je suis sidérée car moi comme parent on ne m'a pas avertie. Je trouve que ça ressemble trop à ce qui s'est passée pendant la seconde guerre mondiale. Ce n'est pas bien pour les enfants d'être ainsi identifiés pour leur religion».

A l’heure où la crise s’étend aux valeurs de la République, à l’heure où le discours raciste et radicaliste reprend ici ou là du poil de la Bête, à l’heure où l’on voit réapparaître les oiseaux de mauvais augure sur certains écrans de télévisons et ondes radios, pour préparer sans doute encore une fois de plus nos compatriotes fragilisés par la crise économique à quelque malheur, il est vital que les authentiques porteurs des valeurs humaines universelles et défenseurs de la démocratie véritable et de la République soient plus visibles, se serrent les coudes et multiplient les efforts et les initiatives pour contrer les discours des porteurs de valises du malheur et de la haine avant qu’ils ne se traduisent en tragédies, comme celles, entre autres, de janvier 2015, encore présentes dans nos mémoires.

On peut dire ce qu’on veut, mais faire porter une pastille rouge ou jaune à des enfants de la République, en catimini, n’est pas acceptable, aujourd’hui, dans notre France de 2015, pas plus qu’hier, pendant l’Occupation. 

C’est scandaleux.

Abdellatif Chamsdine

Paris, 27/09/15